Le fauteuil de velours bleu 5/5

Sa dernière lettre expliquait.

 

La femme qui l’avait accueilli à son arrivée s’était montrée très aimable, habituée à faire le lien entre la vie réelle et ces hôpitaux où l’on entre la peur au ventre et l’esprit en vrac. Après quelques formalités administratives, elle l’avait conduit dans sa chambre.

Celle du deuxième étage qui donne sur le parc, juste à droite de l’escalier.

Là, elle lui avait montré les différents endroits où ranger ses affaires, la salle de bains, les toilettes, son lit, la télévision : « Le médecin passera en début de soirée. Ensuite, je viendrai vous apporter vos médicaments. Le repas sera servi à 19 heures. À tout à l’heure. »

Sa voix était calme, douce, apaisante, déjà infantilisante.  Il est important de rassurer les enfants quand on les éloigne de leur milieu naturel.

Il avait posé son bagage et l’avait ouvert pour ranger ses quelques vêtements mais s’était écroulé sur le lit, fatigué, perdu et inquiet du sort qui lui était réservé. Enfin, au prix d’un énorme effort, il s’était redressé et avait entrepris de vider sa valise. Il avait ouvert le placard : trois étagères et un coin penderie. Il lui avait semblé mettre beaucoup de temps et de soin à ranger ses habits, son nécessaire de toilette et ses affaires personnelles.


Quitte à rester si longtemps quelque part, elle se souvint comme il lui avait été important de marquer son territoire, de poser là sa crème de jour, là les boules pour la protéger contre le bruit, ici, le plus important, ses quelques livres, ses crayons noirs d’écolière, son cahier pour écrire, écrire, écrire…


Enfin, il avait posé sa montre sur la table de nuit et ouvert le tiroir pour y ranger son portefeuille. Un peu brusquement peut-être puisque celui-ci lui resta dans les mains pendant que tombait à terre un papier oublié par un occupant précédent. Il avait remis le tiroir à sa place et ramassé le papier. Il s’agissait d’une enveloppe vide adressée au nom de Mme G…Au dos, le nom de M. G… rue Dareau Paris 14ème.


Seul son mari lui écrivait, avec sa toute minuscule écriture, comme si des mouches avaient trempé leurs petites pattes dans de l’encre bleue.


Il avait tout de suite fait le lien avec cette jolie femme blonde rencontrée dans son quartier, qu’il n’avait jamais oubliée. Il se souvenait avoir demandé à la caissière des précisions sur la chanson qu’elle avait entendue à la radio.

« Elle s’appelle Mme G… mais elle a longtemps chanté sous un pseudonyme, lui avait-t-elle confié en lui donnant son nom d’artiste, vous pouvez trouver facilement ses disques. »

 

 

Elle était devenue maintenant une vieille dame qui soutenait que les lettres avaient bien été reçues dans cet ordre-là, en se souvenant de chaque phrase mais en refusant de les montrer.

– Non, précisait-elle, je n’en ai plus reçu d’autres… Non, je n’ai jamais su qui il était.

 

Assise, bien droite, dans son fauteuil de velours bleu au ton fané, les mains croisées posées devant elle, le regard tourné vers l’invisible – ce regard que nul ne pouvait accrocher – elle continuait à vivre, comme si tout lui était absolument indifférent.

 

Fin

 

Dominique Grassi
Jean-charles Theillac
sur une idée de Catherine Maisse

 

Le fauteuil de velours bleu 4/5

Les lettres qui suivirent lui firent penser à une enquête policière : il cherchait, s’interrogeait sans fin. Il ne voulait pas admettre ce qui lui arrivait, se sentait tiraillé entre culpabilité et innocence. Comment en était-il arrivé là ? Quand en avait-il trop dit ? A quel moment en avait-il trop fait ? Aurait-il réellement dû tout laisser là et fuir ? Il essayait de remonter le temps pour trouver, précisait-il, à quel moment il n’avait pas compris qu’il fallait prendre garde. A quoi ? A qui ?

 

Elle comprit que cette quête à laquelle il se livrait, l’épuisait. Toutes ces interrogations l’amenèrent à penser qu’elle correspondait, même à sens unique, avec un prisonnier, malade sûrement mais prisonnier, suite à elle ne savait quel méfait. D’ailleurs, il n’en disait rien, preuve qu’il avait honte et peur de son jugement s’il avouait.

Elle crut avoir démêlé cet étrange écheveau quand il lui parla, enfin, du décès de sa compagne tout en décrivant les énormes tracasseries de sa belle-famille – quel drôle de mot pour désigner une si laide engeance – qui ne lui avait laissé aucun répit puisqu’elle ne cessait d’insinuer sa responsabilité dans l’accident. La piste « pénale » se confirma dans son esprit… Jusqu’à ce qu’elle lut la dernière phrase : «Je n’étais pas dans la voiture » .

La semaine suivante, elle continua à l’apprendre, à le cerner, à en repérer plus exactement les contours. Ne le connaissait-elle pas depuis toujours ? Elle acquit le sentiment d’avoir déjà croisé ce drôle d’oiseau qui lui racontait sa vie. Sa vie à lui ou la sienne ? Comme lui, après la mort de l’autre, elle avait tenté à s’extraire de ce « bourbier ».  Il s’était jeté à corps perdu dans la peinture et le dessin. Elle, cela avait été l’écriture. Dans son atelier qui lui servait de logis, il avait cherché à retrouver un peu de sérénité. Et puis, il lui décrivait longuement ce quartier qu’il arpentait tout les jours et lui rappelait son enfance et ses grandes promenades au Parc Montsouris avec ses parents. Lui aussi, comme elle, il avait été attiré tout doucement au bord du « puits ».

 

Je me souviens si bien de ma lassitude. La vie était une sourde lutte d’où ne surgissaient que de pénibles conflits. Pourquoi toute cette agitation ? Quelle utilité à toutes ces démarches, quelle nécessité à toutes ces conversations, à tous ces repas, à tous ces voyages d’affaires ? Quand je le disais, je devenais suspect. Je dérangeais. Ces sorties obligées, ces interminables repas avec la sacro-sainte famille, ces réunions « amicales » ! J’aurais dû fuir, me soigner moi-même, mais c’était trop tard. J’aurais dû faire une pause, nager à contre-courant, j’en ai été incapable. Je n’avais plus personne à qui parler, dire mes sentiments, vider ma peine.

Quand elle reçut la lettre suivante, l’avant-dernière, elle commença à mélanger leurs vies à tous les deux, leur histoire, leur deuil, leur chute. Elle lisait ses mots à lui et retrouvait les siens, ceux qu’elle avait pensés si fort qu’il les écrivait à sa place : un matin, il se réveilla derrière ses paupières closes et ne trouva pas la force de les lever. Pas la force, pas l’énergie, ce n’était plus la peine. Il se découvrit à bout de souffle, comme sous une tente à oxygène et ce matin-là, quelqu’un marchait sur le tuyau. Il allait mourir et, pour que tout fût dit, pour que l’on ne lui demandât plus rien, il acceptait la mort.

…à suivre

 

Dominique Grassi
Jean-charles Theillac
sur une idée de Catherine Maisse

 

Le fauteuil de velours bleu 3/5

Toutes ces lettres, elle les recevait bien. Aucune ne se perdait en route. Elle les lisait très attentivement et même, depuis le début, elle les attendait impatiemment, comme si ce qui le sauvait la nourrissait, elle. Elle ne pouvait pas lui répondre et s’étonnait d’apprécier ce rapport ambigu avec un inconnu. Ils étaient donc liés par une relation épistolaire à sens unique ? Tous deux pouvaient d’un instant à l’autre se désengager sans que l’autre puisse intervenir. Il cesserait de lui écrire, elle déchirerait ses lettres : elle n’y pourrait rien, il ne le saurait jamais.


Comme toute relation forte, nouvelle, étonnante, elle avait besoin d’être partagée. Mais à qui en parler ? Cet homme lui faisait confiance. Elle en aurait bien parlé à son frère, Gérard, mais il ne s’embarrassait pas de psychologie inutile et lui aurait à coup sûr affirmé qu’il s’agissait d’un maniaque, un déséquilibré qui avait dû relever son nom et son adresse dans n’importe quel bottin: « La preuve, il te dit qu’il est enfermé derrière des barreaux. Il est sûrement en taule et pour se désennuyer, il s’amuse à t’ennuyer avec ses phrases-mystère. » Il aurait même ajouté avec bonhommie : « Le monde gagnerait en repos si tous les fêlés partaient aux champs. »
Elle avait souri la première fois qu’il lui avait sorti sa formule mais cette idée comportait tout de même un danger pour l’agriculture !

Non, ce n’était pas à lui qu’elle devait se confier.

 

Le hasard lui vint en aide.

Au cours d’une soirée où l’avait conviée une collègue de travail, elle fit la connaissance d’un couple remarquable par sa gaieté et sa joie de vivre. Elle était médecin généraliste et lui, cadre dans une entreprise de pièces détachées.


Une fois le repas terminé, ils passèrent dans une pièce de belle taille aux sièges confortables. Elle se trouva assise près de la femme médecin et commença à parler « métier » avec elle, puisque celle-ci assurait des vacations dans l’organisation mutualiste dans laquelle elle occupait une fonction d’accueil. Au bout de quelques minutes, elle osa évoquer le cas de son étrange « ami ». Comme elle connaissait par cœur certains passages de ses lettres, elle demanda : « Si quelqu’un venait consulter et vous parlait ainsi, quel serait votre diagnostic ?


– Je penserais que cette personne s’adresse à moi déjà bien tard et que son état nécessite qu’elle soit alitée. Il peut s’agir d’une profonde dépression ou encore d’une maladie grave qui se cache derrière cette grande fatigue mais, dans ce cas, votre ami vous décrirait des symptômes plus précis. Vous savez, ajouta-t-elle, il faudrait pratiquer plusieurs examens avant de pouvoir se prononcer, on ne peut rien dire comme cela, sans connaître d’autres détails ».


Craignant de l’avoir déjà trop accaparée – un médecin pourra-t-il jamais passer une soirée amicale sans être contraint de donner une consultation sauvage à tel ou tel autre convive ? – elle la remercia et parla d’autre chose. Ce qu’elle venait d’entendre corroborait ce qu’elle-même pensait. Cet homme était en grand danger physique ou moral. Elle aurait voulu le lui dire. Hélas !
À qui écrire et où ? De toute façon, il le savait et il n’était pas seul : enfermé, bien sûr mais apparemment, soigné. Et pourquoi craindre que les soins qui lui étaient prodigués ne fussent pas les bons. Elle-même, malgré ce qu’il lui en avait coûté de l’admettre, s’était bien sortie de ce marasme qu’il semblait vivre, grâce à des traitements en apparence inhumains, en apparence seulement.


Elle se renseigna cependant auprès de la Poste et obtint le numéro du bureau d’où étaient expédiées les lettres, mais cela ne donnait pas l’indication du lieu précis de leur dépôt. Il y avait tant de boîtes à lettres disséminées dans cette banlieue parisienne. De toute façon, il ne signait que de son prénom. Même si elle avait pu repérer le nom de plusieurs cliniques de repos, un prénom ne suffisait pas pour tenter de lui écrire – était-ce vraiment le bon ? Et puis, il pouvait aussi bien se trouver dans un hôpital, un centre de soins spécialisé ou… dans une prison.


Elle abandonna cette piste de recherche et décida d’attendre qu’il veuille bien se faire connaître. S’il le veut, un jour. Après tout, lui qui semblait surtout prisonnier de lui-même, enfermé, clos, c’était là sa dernière liberté : rester anonyme.


…à suivre


Dominique Grassi
Jean-charles Theillac
sur une idée de Catherine Maisse

 

Le fauteuil de velours bleu 2/5

Comment la connaissait-il ? L’avait-il déjà rencontrée ? Peut-être lui avait-elle parlé un jour ? Ou tout simplement, n’était-il qu’un de ses admirateurs du temps où elle chantait encore. Mais par quel moyen avait-il  obtenu son adresse ?

 
« J’entends ta voix dans tous les bruits du monde » avait-il écrit. Cela ressemblait au vers d’un poème. Elle chercha et découvrit que ces mots étaient de Paul Eluard. Elle s’interrogea aussi sur le sort réservé à ces mots s’ils avaient été reçus par une autre qu’elle-même. Pourquoi avait-elle conservé cette lettre ? Pourquoi attendait-t-elle tous les jours la suite à cette première phrase ?


Elle comprit après plusieurs lettres qu’il les expédiait à jour fixe, observa qu’il s’agissait du mardi. Et toujours cette même écriture longue et cassée, image des grands oiseaux au sol.

 

Elle remarqua qu’il ne parlait que d’un sujet à la fois. Il ne s’en écartait pas et disait bien peu de choses. Hésitait-il devant l’effort à fournir ? Peut-être manquait-il de l’énergie nécessaire pour tracer d’autres mots, d’autres phrases ?

 

Enfin, il put lui écrire plus longuement. Il lui parla du peu de nourriture qu’il absorbait et fit de brefs commentaires sur la composition des menus. Il essaya même d’être drôle. Une autre fois, il décrivit les barreaux aux fenêtres. Il lui exprimait sa méfiance, ses craintes, ne comprenait pas cet enfermement : il n’allait pas s’envoler !

 

Cette phrase fit écho en elle. Elle l’avait elle-même pensé, il y a bien longtemps, lors de son long séjour dans une clinique psychiatrique de la banlieue parisienne. Elle se souvenait si bien de l’effet des médicaments qui la faisaient glisser dans un grand trou noir, à la limite du conscient. Elle gardait comme une empreinte indélébile la mémoire de sa souffrance psychique, du sentiment l’abandon, de l’ennui, du désespoir. Ces remèdes censés être thérapeutiques étaient en réalités « apocalyptiques ».


Lui revint en mémoire qu’ils donnaient un mauvais goût permanent aux aliments et aussi la sensation que trois docteurs entraient en même temps dans sa chambre. Il lui fallait attendre que ses yeux accommodent pour que deux disparaissent et qu’elle puisse parler, à celui qui restait, de ses impressions sans attendre aucune réponse de sa part : il ne pouvait pas comprendre.

Elle en était tout de même sortie des potages sans goût, des « jus de chaussettes » ersatz de café, des toilettes assistées, des barreaux aux fenêtres…


Sans doute, je me fais mal comprendre
, écrivait-il. Grande au début, son écriture changea et devint presqu’illisible. Malgré les efforts touchants qu’il tentait pour écrire le nom des médicaments qu’il absorbait, elle ne parvenait pas toujours à déchiffrer.

 

Il fallait qu’il lui écrive régulièrement, même s’il ne pouvait expédier ses lettres tous les jours. Et c’était tant mieux, il avait si peur de l’ennuyer avec un courrier quotidien. Il s’ennuyait tant lui-même en sa propre compagnie. Il datait ses écrits. Quelquefois, il ajoutait l’heure. Il craignait de mélanger le jour et la nuit. Il notait scrupuleusement six heures ou dix-huit heures ou vingt-trois heures. Des mots… Des mots pour surnager. Il était autre chose que cette moitié d’homme que le personnel soignant infantilisait avec ces petites attentions : «Allezilfautboirelecaféquevouspouvezilnevousferapasdemal ».


Il ne supportait plus de se sentir amoindri dans leur regard mais ce qui lui importait, c’est qu’elle ne le voit pas, elle dont la lumière éclairait ses pénombres. Il devait lui dire ses pensées, sa misère, son mal-être, pour rester en vie et ne pas sombrer.


L’image du grand oiseau se modifia, devint celle d’une épave à la mer, ballotée d’un côté l’autre par les éléments. Elle lisait la souffrance endurée dans son écriture à présent ridiculement amenuisée, dans ses phrases tantôt laconiques, tantôt étirées jusqu’à la démesure, sans ponctuation, ce qui ajoutait à la difficile tâche de lecture.

Elle ne cessait de se questionner : pourquoi moi, pourquoi m’écrit-il, à moi ? Il lui demandait de garder ses messages, qu’il viendrait les chercher un jour. Il insistait pour qu’elle les décrypte. Il parlait de ses lettres et ne parlait jamais d’elle. Il lui avait assigné un rôle silencieux. Il disait que, sans cette possibilité de lui écrire, il ne survivrait pas à l’épreuve qu’il traversait. Si elle le lisait, si elle comprenait, alors il vivrait.  Devenue garante de son existence, de son équilibre, il lui prêtait des vertus magiques.


Mais comment pouvait-il être certain qu’elle recevait ses lettres et les lisait ?


…à suivre

Dominique Grassi
Jean-charles Theillac
sur une idée de Catherine Maisse

Le fauteuil de velours bleu 1/5

Un jour elle reçut, par la poste, une enveloppe à ses nom et adresse, qu’elle décacheta. Sur une page arrachée à un cahier d’écolier, une seule phrase était écrite : J’entends ta voix dans tous les bruits du monde.


Ces mots, comme posés à la hâte, tracés d’une longue écriture cassée, dégingandée, lui évoquèrent ces grands oiseaux surpris une patte levée et dont on attend, en vain, qu’ils la posent. Ils vivent de cette façon. Quand ils marchent, c’est avec lenteur. Ils semblent posséder l’éternité : en apparence rien de les préoccupe. De haute taille, précautionneux et malhabiles au sol, ils deviennent splendeur quand, dans un grand mouvement d’ensemble, ils s’élèvent, nuage rose, vers le ciel.

 

Il ressemblait à ce grand et bel oiseau. Il vivait seul à Paris, dans un modeste atelier de peintre, rue des Artistes, à deux pas de la rue de la Tombe Issoire et trimbalait souvent sa solitude, au hasard dans ce quartier. On aurait dit un personnage de la légende du fameux géant Issoire, détrousseur de bonnes gens au Moyen-âge, tué par Guillaume d’Orange. Il tellement était grand qu’on lui trancha la tête. Ses restes furent enterrés dans cette voie bien nommée, qui permettait, depuis Orléans, de rejoindre le centre de Paris.

Un après-midi d’été, alors qu’il déambulait sous les platanes de l’avenue du Président
René Coty, paradis des promeneurs de chiens du 14ème arrondissement, il tomba en arrêt devant une très belle femme. Blonde, de taille moyenne, elle était plongée dans la consultation d’un carnet dans lequel elle semblait ne pas trouver ce qu’elle cherchait : un nom, une adresse, un numéro de téléphone ?  Il sourit à l’idée qu’il aurait aimé que ce fut le sien. Alors, tranquillement, il s’assit sur un banc pour la contempler sans aucune retenue mais il n’osa pas lui adresser la parole.


Au bout de quelques courtes minutes, la femme s’éloigna après avoir rangé le carnet dans son sac. Alors que sa raison lui dictait de la rattraper, de lui parler, de lui demander l’heure, de faire n’importe quoi mais de ne pas la laisser partir ainsi, il resta immobile, longtemps, perdu dans ses pensées.


Comme d’habitude, il rentrerait chez lui, seul, retrouver ses chers fusains car il dessinait beaucoup plus qu’il ne peignait. Il avait tant d’émotions à exprimer !


Avant, il fit quelques courses au supermarché de la rue Dareau. Comme il arrivait à la caisse, son cœur se mit à battre plus fort. Elle était là, devant lui, avec son panier et lui se retrouvait comme un communiant devant l’autel.


La caissière dit à sa cliente : « Bonjour Madame G… ! Je vous ai entendue ce matin à la radio. Oh ! c’était une belle chanson ! La route…

– Bleue, répondit-elle en souriant ». Resplendissante et belle, elle échangeait des amabilités avec la caissière. Ainsi, elle était sûrement sa voisine.


Il en savait assez pour oser espérer. Mais pas assez encore pour en être, ne serait-ce qu’un peu, heureux.

…à suivre

 

Dominique Grassi
Jean-charles Theillac
sur une idée de Catherine Maisse